Frogans : un web alternatif, français, prêt à prendre son envol

Frogans : un web alternatif, français, prêt à prendre son envol Il est désormais possible de souscrire des adresses Frogans auprès de registrars. Derrière ce projet fou se cache un fonds de dotation technologique créé par deux Français.

La technologie Frogans n'est pas nouvelle. Ce projet fou qui vise à proposer une alternative au Web est né dans la tête de deux Français en 1999 : Alexis Tamas (ingénieur ENST) et Amaury Grimbert (issu de Dauphine). Son objectif : avancer une couche de présentation, au dessus du protocole Internet (IP), qui soit mieux adaptée aux usages réseau d'aujourd'hui. "Le World Wide Web a été conçu il y a 25 ans. L'idée, avec cette initiative, est de proposer un Web tenant compte des défis actuels : un Web plus sécurisé, mais aussi plus léger compte-tenu de la montée en puissance des accès mobiles", explique Stéphane Van Gelder, porte-parole du projet, qui précise que 20 millions d'euros ont été investis dans cette technologie. En ligne de mire : étendre la présence du réseau à des zones mal couvertes, et faire face aux limitations des smartphones à bas coûts et faibles capacités des pays en développement.

L'intérêt pour cette initiative a été relancé cette année. L'Icann et l'Afnic se sont récemment penchés sur le projet. Une conférence sur Frogans a été organisée en mai dernier avec des représentants des deux organisations, qui ont ainsi publiquement apporté leur soutien au chantier. Il est aussi possible désormais d'enregistrer des adresses Frogans, en passant par les premiers registrars qui viennent d'être habilités. Le projet Frogans sort donc du bois.

 

Une alternative au Web pour de nouveaux usages mobiles

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Capture d'un exemple de site en Frogans. © OP3FT

Le Frogans s'inspire du protocole HTTP, et repose sur un langage de balisage similaire au HTML, baptisé FSDL (pour Frogans Slide Description Language). Est-ce à dire qu'il a pour vocation à remplacer le Web ? "Non", répond le porte-parole du projet qui est aussi un consultant bien connu sur les questions de nom de domaine, gouvernance de l'Internet et stratégies Web. "Le Frogans est au Web, ce que la messagerie instantanée est à l'e-mail", résume Stéphane Van Gelder.

Pour l'heure disponible en une dizaine de catégories linguistiques, le Frogans dispose de son navigateur pour permettre l'accès aux sites en FSDL (le Frogans Player). Proposé sous la forme d'un standard ouvert, le FDSL s'accompagne sans surprise d'une ergonomie plus dépouillée que le HTML. Il est dessiné pour construire des mini-sites ou "sites vignettes" qui s'adaptent à toute taille d'écran en offrant des pages légères. "Une connexion 2G suffit car le poids de chaque slide Frogans est de quelques dizaines de ko au plus", note Stéphane Van Gelder. Mais cette technologie se veut aussi nettement plus sécurisée que son aînée. A la différence du Web, elle ne permet pas de récupérer des données en provenance du terminal sans le consentement explicite de son utilisateur. Exit les scripts et autres codes malicieux... Des formulaires simplifiés pourront cependant être intégrés pour remonter vers le serveur des informations saisies par l'internaute.

Quatre registrars commercialisant des adresses Frogans

"Le Frogans est au Web, ce que la messagerie instantanée à l'e-mail" (Stéphane Van Gelder - porte-parole du projet)

En vue de protéger le Frogans de toute exploitation commerciale tierce, ses fondateurs ont créé un fonds de dotation technologique. Baptisé l'OP3FT (Organisation pour la Promotion, la Protection et le Progrès de la Technologie Frogans), il pourra accueillir des contributions extérieures pour faire évoluer la spécification FSDL, notamment à travers la mise en place de comité d'experts.

Comment est orchestré l'enregistrement d'adresses Frogans ? C'est STG Interactive, la société de ses fondateurs, qui va jouer le rôle d'opérateur, au même titre que l'Icann pour le .com ou l'Afnic pour le .fr. Trois registrars auprès desquels souscrire les adresses ont été habilités par STG Interactive : Witetic, ProDomaines (avec un site dédié) et SafeBrands by MailClub. Les adresses de sites en Frogans se présentent de la manière suivante : Nom-de-Réseau*Nom-de-Site (le * renvoyant à la logique du @ pour les adresses e-mails). Il est possible d'utiliser le réseau public Frogans (frogans*Nom-de-Site), ou déposer et activer son propre réseau - qui pourra renvoyer par exemple à un nom d'entreprise, ou de marque, s'il est public, ou un nom de code interne dans le cas d'un intranet. Dans tous les cas, les adresses de sites et de réseaux Frogans sont enregistrées dans une base centralisée, le Registre Central Frogans ou FCR (FrogansCore Registry) opérée par STG Interactive.

"Les tarifs d'enregistrement d'une adresse Frogans pourront varier en fonction des services proposés par le registrar en complément à l'enregistrement de l'adresse dans le FCR. Dans la pratique, on peut s'attendre à voir sur le marché des coûts annuels de quelques dizaines d'euros, soit un montant équivalent à l'annuité d'un nom de domaine en .com", précise STG Interactive. Qu'en est-il de l'enregistrement d'un réseau dédié ? "Elle devrait se monter à quelques milliers d'euros", complète STG Interactive.